Après le petit déjeuner, nous louons deux
VTT pour partir explorer les environs. La chaleur est énorme, lourde,
car chargée d'humidité. Très vite, après deux kilomètres, la route s'incline
pour gravir la pente. Nos petites fibres musculaires si fragiles rêvent
de stéroïdes, de créatine, d'hormones cyclophysiques. Je joue les caïds
quelques minutes en montant à mon rythme, en revenant chercher Martine,
en reprenant à nouveau quelques longueurs d'avance...etc. Mais j'ai beau
jeu de raser les bananiers géants, car d'ombre il n'est point question
à l'heure du zénith. |

|
Le soleil cogne sur la cabeza et l'effort maltraite
le corazon. Comme je mets pied à terre pour attendre Martine, je manque
m'évanouir. Vacillant sur mes jambes, je me vois déjà disparaître dans
l'exotique fouillis végétal à mes pieds. Qui sait si parmi ces monstres
chlorophylliens, ne se cache pas une plante carnivore, un morphal aux
canines de nectar ou un boucher au pistil tranchant ? Nous nous reposons
quelques secondes à la sombra mais ne sombrons pas. Fort heureusement,
mon moteur s'est mis à crachoter près d'une jolie rivière qui dévale
la colline en une succession de petites terrasses, de véritables baignoires
naturelles qui nous appellent avec beaucoup de sollicitude. Nous nous
laissons guidés par ces sirènes et en profitons pour y rafraîchir nos
pistons chauffés à blanc. Martine ramène sa température interne à 38,5°C
et sa température externe à 53°C. Nos deux corps plongés comme deux
résistances dans le petit bassin réchauffent à un tel point l'eau, qu'une
jeune brésilienne vient aussitôt y laver ses longs cheveux, non sans
avoir immergé son corps entier dans cette eau tiédie par notre transpiration
acide et fumante. Nous laissons l'ingénue à ces jeux de mousse, reprenons
la route sur nos vélocipèdes tous terrains, sautons d'une ombre à l'autre,
parfois à pied. Nous hésitons à faire demi-tour,
quand notre objectif, un toboggan naturel de pierre sur lequel coule
une rivière, surgit enfin au détour d'un dernier virage très pentu.

Le toboggan fait 7 à 8 mètres de large et environ 15
à 20 mètres de long. Le réceptacle est un petit bassin profond de deux
mètres. Peu de volontaires se jettent sur cette pierre glissante, sinon
le roi du lieu, un danseur, un fou, qui descend sur les pieds ou en
tourbillonnant, accélérant comme un savon aux parfums de coco sur le
granit convexe, amerrissant sur la tranche à l'endroit le plus étroit
du bassin, cinquante centimètres au plus. Il me guide en haut. Point
d'échelle mais un chemin argileux dans la forêt. Derrière moi une cascade
alimente le toboggan. Je respecte l'axe de chute conseillé par mon guide
et me lance prudemment, freinant des quatre fers et du popotin. Les
derniers mètres sont plus raides et dynamisent l'explosion finale. Sous
le regard japonais de Martine, j'améliore ensuite ma technique, mais
les photos qu'elle prend de mes diverses tentatives, révéleront la face
cachée de l'histoire écrite, le manque total d'élégance de mes postures
compétitrices. Martine hésite à se lancer mais l'orteil convalescent
l'en dissuade sagement.
|