Les voyages en bus commencent à nous peser. Personnellement je ne tiens pas à me déplacer en avion. Je ne souhaite pas survoler ce continent, je ne souhaite pas m'éloigner de tous ces parfums que l'on capte ici, malgré la fatigue. J'aimerais que ce voyage, jusqu'à son terme, soit un cheminement de rampant. Aujourd'hui nous devons enchaîner 12 heures de bus jusque São Paulo, trois heures d'attente dans cette mégapole, puis cinq heures trente de bus jusque Paraty. Le bus surfe pour l'instant sur la périphérie de São Paulo, nous faisant entrevoir clairement deux images significatives d'urbanisme, bien opposées dans leur conception. Sous les rues du bus, dans chaque ravin, sous les ponts, au milieu des espaces verts, les bidonvilles d'une ville bidon, les taudis de planches d'une ville science-fiction de 19 millions d'âmes, polluées par l'intense et immonde déjection urbaine. Tout comme les arbres de la selva poussent jusqu'à la canopée pour s'ensoleiller de vie, les gratte-ciel de São Paulo recherchent au-dessus de la couette grasse des senteurs autrement exotiques, et le font si parfaitement que Manhattan en rougirait de honte, si du haut de ses 431 mètres l'Empire State Building pouvait apercevoir l'immense étendue de cette forêt de troncs alvéolés. Localisée à mi-chemin des deux monstres que sont Rio et São Paulo, Paraty se situe sur l'une des plus belles routes au monde, ce dont nous avons rapidement confirmation, aussitôt la côte rejointe. La végétation est grandiose, démesurée, et le littoral déchiqueté n'est que succession de baies, de criques, avec, très proches, des dizaines et des dizaines d'îlots, des petites plages blanches incurvées, des petits villages tout paisibles, les pieds dans l'eau, le poisson dans l'assiette. |
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